Par Thomas Nybo
PORT-AU-PRINCE, Haïti, 31 mai 2013 – Lors du tremblement de terre de 2010, Jean Saint-Phar a été enseveli dans l’effondrement des murs de la classe où il étudiait la mécanique puis il a perdu connaissance. Une fois revenu à lui, des heures se sont passées sans le moindre signe d’arrivée des secours. Il redoutait de mourir comme les élèves sans vie se trouvant à ses côtés.
« Si je m’étais enfui de la salle de classe, je serais mort, » dit-il. « L’école s’est effondrée comme un château de cartes. Je pensais que c’était la fin du monde. »
Jean s’est retrouvé coincé pendant si longtemps que, quand il a finalement été secouru, son pied gauche écrasé était infecté par la gangrène et a dû être amputé. Son pied droit et sa cheville étaient aussi gravement blessés et dix-huit opérations ont été nécessaires pour qu’ils ne soient pas amputés et puissent fonctionner de nouveau. Aujourd’hui, il porte un pied gauche artificiel et marche avec seulement un léger boitement.
« La partie la plus difficile de ma vie, c’est de prendre les transports publics, » dit Jean. « Les gens ne peuvent pas voir mon handicap et, dans la foule, je suis bousculé ce qui fait que j’ai parfois du mal à rester debout et à marcher. »
« Pour aggraver encore la situation, » dit Jean, « les rues sont accidentées et les trottoirs jonchés de nids de poule. »
« Haïti est un endroit difficile pour les personnes handicapées, » dit-il. « À mon avis, seulement 3% des édifices sont vraiment accessibles aux personnes handicapées. »
Une situation difficile
Gérald Oriol Jr ne connaît que trop bien ces difficultés. Il est né avec une dystrophie musculaire et se sert d’un fauteuil roulant depuis l’âge de six ans. Il est également diplômé de Harvard et est, en Haïti, Secrétaire d’État à l’intégration des personnes handicapées.
« En Haïti, le nombre de personnes handicapées se situe entre 800 000 et 1 000000, dit-il. Malheureusement, nous n’avons pas encore de statistiques précises, il s’agit d’estimations générales.
« En Haïti, la grande majorité des personnes handicapées vivent dans une extrême pauvreté et la situation, de toute évidence, est difficile. L’accès à l’éducation reste un défi majeur. L’accès aux programmes de formation professionnelle est également très difficile. »
Voici pour l’aspect négatif. « Mais l’aspect positif, affirme Gérard Oriol, c’est que la situation est en train de s’améliorer et le Gouvernement s’efforce, avec l’appui de l’UNICEF, d’adopter une approche qui soit davantage fondée sur l’intégration et soit plus équitable afin d’améliorer la vie des handicapés. »
« Par exemple, nous travaillons en ce moment avec le Ministère des travaux publics pour garantir que l’accessibilité soit prise en compte dans les nouvelles normes de construction, dit-il. Nous collaborons avec le Ministère de l’éducation pour nous assurer que les nouvelles écoles soient accessibles aux enfants handicapés et nous sommes aussi en train de remettre en état plusieurs écoles dans différents départements pour faire en sorte que les enfants handicapés aient accès à ces écoles. »
Le Gouvernement haïtien a aussi offert un certain nombre de bourses modestes à des élèves comme Jean pour qu’ils puissent terminer leurs études.
Citoyens actifs
« Les enfants handicapés – si on leur en donne la possibilité, s’ils peuvent aller à l’école, s’ils peuvent accéder à l’éducation comme tous les enfants – peuvent tout aussi bien réussir. Et ils peuvent être des citoyens complètement actifs pouvant contribuer au développement du pays. »
L’UNICEF partage la vision de Gérard Oriol sur la protection des droits des enfants, particulièrement de ceux qui sont les plus exclus.
« Bien que la situation soit bien sûr complexe et difficile, le Gouvernement a promis de faire en sorte que les handicaps se trouvent tout en haut de la liste de son programme et de veiller à améliorer la situation générale des personnes handicapées, dit-il. Il dépense beaucoup d’énergie face à leur problème et s’y intéresse de près, afin veiller à ce que les personnes handicapées ne soient pas laissées pour compte dans la reconstruction d’Haïti, et qu’elles puissent, comme tout le monde, exercer intégralement leurs droits et leur citoyenneté. »